Cécile Patinier, « un métier riche de sa diversité » au cœur de la réinsertion

Conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation (CPIP) depuis un peu plus d’un an, Cécile Patinier travaille à Dunkerque, l’une des 104 antennes de France. En prison comme à l’extérieur, elle accompagne les condamnés jusqu’à leur fin de peine. Sa mission est au cœur de la réinsertion.

Sacha Gross (rédaction), Julie Subitte (Edition)

« Même si ce n’est pas facile tous les jours, ce qui fait la beauté de ce métier, c’est sa diversité. » Diversité que Cécile Patinier retrouve dans son quotidien d’agent de probation. Les individus sont aussi nombreux que leurs vécus sont vastes. La jeune femme de 26 ans les rencontre à l’intérieur d’un centre de détention quand ils sont incarcérés. Elle reçoit dans son bureau les personnes sous contrôle judiciaire ou condamnées à des peines aménagées. Son rôle est de les accompagner et les guider vers la réinsertion.

Alors étudiante en droit, elle découvre le métier de conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation au détour d’une conférence: « J’ai fait un DUT Carrière Juridique. Un jour, on a eu une conférence animée par le directeur d’un centre qui a présenté les métiers de la probation.« 

Officiellement diplômée depuis un an et demi, elle travaille actuellement comme contractuelle à Dunkerque. Il y a 104 CPIP en France. Cécile Patinier souhaite s’installer durablement dans ce métier qu’elle estime ne pas être toujours reconnu à sa juste valeur. Avant tout pour la première « richesse » que lui offre sa profession : l’humain, dans toute sa diversité.

Un tuteur dans l’univers carcéral

Chaque agent a la charge « d’environ 80 dossiers ». Qui se traduisent par de nombreux entretiens que ce soit en milieu ouvert ou fermé. Pour contrôler le respect d’une peine ou, quand il s’agit de détenus, pour préparer leur sortie. Les entretiens servent à trouver un logement, un emploi.

Par l’intermédiaire de ces échanges, la conseillère fait également avancer le condamné sur un plan psychologique : « On essaie de comprendre avec la personne pourquoi elle est passée à l’acte, comment elle a pensé comme ça et pourquoi ? On va essayer de changer ses biais cognitifs en quelque sorte.« 

L’agent probatoire constitue un tuteur au sein du monde carcéral et tisse un lien privilégié avec les personnes suivies. Les condamnés disent fréquemment « Mon CPIP m’a dit, mon CPIP a fait…« 

« Tout ce qui est dit doit être écrit »

« La mission d’un CPIP prend quand même beaucoup la forme d’un travail de bureau », poursuit Cécile Patinier. Après chaque entretien, elle doit adresser un rapport au juge d’application des peines. Elle y retranscrit les entretiens, évoque les démarches de la personne suivie, note son comportement et son respect des obligations quand il y en a : « Tout ce qui est dit doit être écrit. Ça fait partie des procédures pour que l’ensemble des dossiers soient viables et valables. » Pour décider d’une libération conditionnelle ou au contraire de la révocation d’un sursis, le juge d’application des peines s’appuiera sur le rapport du CPIP.

Comme toutes les strates du monde judiciaire, les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation sont soumis à des cadences de travail très difficiles. Résultat ? Cécile Patinier n’a pas le temps nécessaire pour s’occuper de ses dossiers comme elle le souhaiterait : « Les rendez-vous avec les détenus devraient s’établir autour de 45 minutes voire une heure pour certains. Le résultat, c’est que ça ne dépasse pas les trente minutes. » La cadence peut parfois nuire à la rigueur dans le suivi de chaque dossier : « Certains collègues ne lèvent pas le nez de leurs dossiers, ils travaillent sans arrêt. Il y a un risque de mélanger les dossiers. »

« Avec le temps, certains détenus finissent par oublier pourquoi ils viennent nous voir« 

Pour Cécile Patinier, l’engorgement de la justice et les délais induits remettent aussi en cause l’essence de son métier. Le temps entre chaque entrevue étant de plus en plus long, le suivi des condamnés n’est pas réalisé convenablement. Certains, psychologiquement ou socialement fragiles, ne parviennent parfois plus à se remémorer la raison de leur présence dans le bureau de la conseillère : « Quand je leur demande ce qui les amène, certains répondent « je ne sais plus, c’était il y a trop longtemps. » Avec le temps, certains finissent par oublier pourquoi ils viennent me voir. »


Pour autant, Cécile Patinier garde son enthousiasme pour un métier qui lui fait épauler toutes sortes de personnalités : « Je peux avoir des personnes qui ont arrêté d’aller à l’école à huit ans comme des chefs d’entreprise avec une vie plus stable. Ce qui fait la richesse de ce métier, c’est sa diversité. »